OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Plainte contre un big brother français en Syrie http://owni.fr/2012/07/25/plainte-big-brothers-francais-syrie-qosmos-fidh-ldh/ http://owni.fr/2012/07/25/plainte-big-brothers-francais-syrie-qosmos-fidh-ldh/#comments Wed, 25 Jul 2012 05:56:24 +0000 Pierre Alonso http://owni.fr/?p=116936

L’étau se resserre un peu plus autour des marchands d’armes de surveillance. Selon nos informations, la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH) doivent déposer ce mercredi une dénonciation au parquet de Paris. Ce signalement auprès du procureur vise des sociétés françaises, dont Qosmos, pour leurs activités en Syrie.

Dans ce document qu’Owni a consulté, les deux organisations ciblent la participation de Qosmos “aux opérations de répression réalisées par le régime de Bachar El Assad à l’encontre du peuple syrien”. La société a été “mise en cause pour avoir contribué à fournir au régime syrien le matériel de surveillance électronique nécessaire à la répression de la contestation”. Ce qui fait penser à la FIDH et à la LDH que Qosmos, à l’instar d’autres sociétés françaises, “[pourrait] être impliqu[é] dans la commission d’actes de tortures et de crimes contre l’Humanité.”

Surveillance massive

En novembre 2011, l’agence Bloomberg révélait que Qosmos fournissait du matériel à l’entreprise italienne Area SpA dans le cadre d’un projet de surveillance massive des réseaux syriens, baptisé Asfador. Depuis plusieurs mois, le site français Reflets.info se faisait l’écho de l’utilisation en Syrie du deep packet inspection, une technologie duale qui permet de mesurer la qualité du trafic ou d’espionner les échanges, y compris à grande échelle. Une technologie fournie par des fabricants occidentaux, notamment Qosmos.

Selon le directeur du service marketing de Qosmos, Erik Larsson, la technologie fournie permettait de “fouiller dans les mails et de reconstituer tout ce qui se passe sur l’ordinateur d’un internaute”. Le directeur, Thibaut Bechetoille, avait pour sa part reconnu qu’il n’était pas “convenable de continuer à soutenir ce régime”, précisant que la société s’était retirée quatre semaines auparavant conformément à une décision du conseil d’administration.

La carte d’un monde d’espions

La carte d’un monde d’espions

OWNI en partenariat avec Wikileaks vous propose cette carte interactive permettant d'identifier toutes les sociétés à ...

Une décision qui n’a pas convaincu les organisations de défense des droits humains. D’autant que des questions restent en suspens quant à l’effectivité de ce retrait et la date à laquelle il serait intervenu. Pour Me Clémence Bectarte, avocate à la FIDH, l’argument du retrait est d’autant plus fallacieux que “le régime de Bachar Al Assad n’était pas fréquentable, même avant le début de la révolte en mars 2011.”

Dans les pas d’Amesys

Il reviendra donc au parquet de Paris de décider d’ouvrir ou non une enquête. Amesys, filiale de Bull connue pour la vente de son système d’espionnage à grande échelle à la Libye de Kadhafi, fait désormais l’objet d’une information judiciaire après une plainte conjointe des deux organisations pour “complicité de crimes de tortures et traitements inhumains, cruels ou dégradants.” Les aventures syriennes de Qosmos pourraient lui faire suivre les pas libyens d’Amesys.

Avec cette interpellation formelle, les organisations ont une double intention, détaillée par Me Bectarte :

Le premier objectif est évidemment judiciaire, pour stopper ce commerce impuni d’armes de surveillance avec ces régimes. Mais nous voulons aussi alerter pour que la législation évolue.

Vendredi la ministre déléguée à l’économie numérique, Fleur Pellerin, s’est prononcée contre “l’exportation [par la France] de systèmes de surveillance d’Internet”.

[Mise à jour, 26 juillet 2012 : Selon l'AFP, le parquet de Paris a décidé d'ouvrir une enquête préliminaire contre Qosmos. La section recherche de la gendarmerie sera en charge de l'enquête qui pourrait déboucher sur une l'ouverture d'information judiciaire, pilotée par un juge d'instruction, ou sur le classement de l'affaire.]


• A lire sur les affaires libyennes d’Amesys : Au pays de Candy, enquête sur les marchands d’armes de surveillances, de Jean-Marc Manach, paru chez Owni Editions.

• Illustration par Loguy pour Owni

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God Save the net http://owni.fr/2012/04/05/god-save-the-net/ http://owni.fr/2012/04/05/god-save-the-net/#comments Thu, 05 Apr 2012 07:33:42 +0000 Guillaume Ledit http://owni.fr/?p=104594 "V pour Vendetta" projeté dans la réalité. Avec un peu d'avance sur certaines réflexions sécuritaires françaises, une partie du gouvernement britannique conçoit actuellement un dispositif législatif permettant une surveillance globale et systématique d'Internet. Au nom de la lutte contre le terrorisme, en général. Parce que la terreur est partout, Sir. ]]>

La surveillance généralisée et le contrôle accru des réseaux de communication. Des thématiques décidément à la mode. Dernier avatar de cette tendance en France :  l’annonce par le président-candidat Nicolas Sarkozy de la création d’un délit de consultation des sites faisant l’apologie du terrorisme.

Au Royaume-Uni, les autorités ont poussé le bouchon sécuritaire un peu plus loin. Selon une représentante du ministère de l’Intérieur (Home Office), un nouveau projet de loi est dans les tuyaux. Citée par le Guardian , elle affirme qu’il aura pour objet de lutter plus efficacement contre “les crimes graves et le terrorisme”.

Le mot ici aussi est lâché. Des deux côtés de la Manche, c’est donc la crainte des vilains terroristes qui pousse à une surveillance généralisée du réseau. Et des activités de l’ensemble de ses utilisateurs.

Surveillance généralisée

Les informations qui ont filtré sont pour le moins fragmentaires. Chez Big Brother Watch, association britannique de défense des libertés, Emma Carr, directrice adjointe, nous précise : “Des réunions secrètes ont eu lieu avec des députés ou des représentants de l’industrie”. Avec pour objectif de préparer un projet de loi, qui devrait être présenté lors du discours de la reine le 9 mai. Tradition toute britannique, ce discours fixe en effet les orientations législatives du royaume pour l’année à venir.

L’idée est de mettre en pratique le rêve de toute agence de renseignement qui se respecte : un dispositif de surveillance généralisée et permanente de l’ensemble des communications électroniques et téléphoniques d’une population. Selon Emma Carr, les choses sont plutôt claires: ” ce sont les membres du GCHQ qui sont à la manœuvre”.

Le Government Communications Headquarters (GCHQ), l’une des trois agences de renseignement britannique, spécialisée elle dans la surveillance électronique. Et à ce titre le plus grand service occidental d’interception des communications, derrière la NSA (les “grandes oreilles” américaines). Son slogan, “Maintenir notre société sûre à l’ère d’Internet”, est digne d’un Minority Report , dans lequel l’auteur de science-fiction Philip K. Dick imagine une police omniprésente, qui arrête les criminels avant même qu’ils aient eu l’idée de commettre leur méfait.

Deep Packet Inspection

Si nous n’en sommes pas encore à la prévision des crimes par des humains mutants en état de stase, le gouvernement souhaite se doter d’un système permettant d’accéder à l’ensemble des “données de communication”. Et ce en se passant de l’autorisation d’un juge.

Selon les explications des représentants du gouvernement, le système reposerait essentiellement sur les intermédiaires techniques (fournisseurs d’accès à Internet, opérateurs téléphoniques, hébergeurs). Et permettrait aux renseignements d’avoir accès en temps réel à une sorte de registre de communications de l’ensemble des citoyens de sa majesté. Chat, SMS, mails, appels téléphoniques, tout y serait consigné, ainsi que leurs horaires, fréquences, durées. Pour le contenu des échanges en revanche, une utilisation préalable resterait nécessaire.

En l’état du droit britannique, comme dans la majeure partie des démocraties occidentales, de telles données ne sont accessibles que dans le cadre d’une enquête, et après autorisation du juge. Les derniers chiffres disponibles [PDF] font état de 525,130 demandes en 2009, provenant de multiples autorités dépendant de près ou de loin du gouvernement, dans le cadre du Regulation of Investigatory Powers Act 2000 (RIPA).

Pour les spécialistes du réseau, cette surveillance généralisée d’Internet devrait passer par une technique déjà connus : le Deep Packet Inspection (DPI). Le même type de technologie que celle vendue par la société Amesys à la Libye du colonel Kadhafi.

L’agenda des services

Isabelle Sankey, du lobby de défense des libertés publiques Liberty, voit clairement dans ce projet de loi l’œuvre des services de renseignement :

Quel que soit le gouvernement, les grandes ambitions d’espionnage des agences de renseignement ne changent pas.

Chez Big Brother Watch, Emma Carr pointe également l’opportunisme politique de certains membres du gouvernement : “Les libéraux-démocrates [NDLR: dont le leader, Nick Clegg, est aujourd'hui Vice-Premier ministre] avaient férocement combattu un projet similaire en 2009. Je me demande comment ils vont se positionner au Parlement”.

En 2009 déjà, un projet de loi similaire avait été en effet débattu au Parlement. Introduit par le gouvernement travailliste, il avait été ajourné après une importante mobilisation au sein de la société civile. Des membres du parti de Nick Clegg manifestent d’ores et déjà leur opposition et ont obtenu du Vice-Premier ministre la tenue d’auditions publiques au Parlement. Au cours de son discours d’investiture, le leader des libéraux-démocrates disait d’ailleurs vouloir “enterrer la société de surveillance”.

Les associations de défense des libertés et certains acteurs d’Internet se mobilisent également pour son ajournement. Ces derniers pointent d’ailleurs les difficultés et le coût de la mise en place d’un système de surveillance généralisé. Et les conséquences que cela pourrait entraîner, comme la massification de techniques de contournement. Et Emma Carr de conclure :

L’idée est de faire comprendre qu’un tel projet de loi est tout simplement inacceptable dans une société démocratique.


Photos sous licences creative commons par Dr John 500, Jt Blackwell

Édition photo par Ophelia Noor pour Owni /-)

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Birmanie, l’Internet dangereusement civilisé http://owni.fr/2011/06/17/birmanie-l%e2%80%99internet-dangereusement-civilise/ http://owni.fr/2011/06/17/birmanie-l%e2%80%99internet-dangereusement-civilise/#comments Fri, 17 Jun 2011 14:00:40 +0000 Olivier Tesquet http://owni.fr/?p=68361

En Birmanie, le salaire moyen mensuel est de 30 dollars. Pour bénéficier de l’ADSL, il faut en débourser 120. Dans un pays où la majorité des habitants se connecte au réseau dans des cybercafés faute d’un équipement domestique, l’état de l’infrastructure nous ramène aux années 90, quand le haut débit n’existait pas, que la fibre optique était une utopie pas encore réalisée, et que le consommateur lambda s’accrochait à un forfait de 20 heures en mesurant sa chance.

Mais la vétusté du Myanmar ne fait pas tout : il faut également compter sur une censure extrêmement efficace, qui vaut au pays d’être classé dans la liste peu reluisante des “ennemis de l’Internet”, établie par Reporters Sans Frontières. Sur plus de 12 000 adresses IP distribuées aux fournisseurs d’accès locaux, tous inféodés au régime, seule une grosse centaine répond, une situation inique que le hacker et militant Jacob Appelbaum résume en ces termes:

Cela veut dire que tous les réseaux birmans, à l’exception de cette centaine, sont coupés du monde extérieur.

En tout et pour tout, le pays ne dispose que de trois fournisseurs d’accès, dont le plus important est représenté par le Ministry of Post and Telecommunications (MPT), donc l’Etat, qui garde la haute main sur le bouton d’alimentation du réseau.

Alors que l’Iran songe sérieusement à se doter d’un intranet national qui faciliterait encore un peu plus le travail des censeurs, le modèle birman s’affiche comme l’un des plus coercitifs au monde, sévèrement encadré par un arsenal de lois peu respectueuses des droits de l’homme et de la liberté d’expression. Et c’est une entreprise française, Alcatel-Lucent, qui fournit l’infrastructure de contrôle.

Alors qu’il tournait un documentaire sur place, le journaliste français Paul Moreira a découvert que le géant des télécommunications avait vendu sa technologie d’”interception légale” en partenariat avec la Chine. Dans le jargon, ce matériel de pointe porte un autre nom poli, le “Deep Packet Inspection” (DPI). Concrètement, il permet à un Etat de filtrer et lire l’intégralité des échanges électroniques de sa population, soit une arme redoutable pour tracer les dissidents. Pour se défausser de l’implication d’Alcatel, un de ses responsables propose cette pirouette rhétorique : “Qu’est-ce qu’il vaut mieux ? Des communications restreintes ou pas de communications du tout ?”

Ce n’est probablement pas l’avis de Zarganar, Nay Phone Latt et “Nat Soe”, trois blogueurs emprisonnés pour avoir exprimé un peu trop publiquement leurs opinions. Ils purgent actuellement des peines comprises entre 10 et 35 ans. En 2007 puis 2010, la junte a affiné son appareil répressif, en rationnant par exemple l’utilisation du Net à des tranches de six heures. Ce n’est pas un hasard si certains parlent de “Myanmar Wide Web” – une référence ironique au World Wide Web – pour évoquer le verrou birman.

Pour essayer de contourner ce pare-feu, des initiatives se développent, comme les Barcamps, dont la première mouture birmane a été organisée à Rangoun les 23 et 24 janvier 2010, rassemblant pas moins de 2 700 participants. Leur objectif ? Sensibiliser la population aux questions numériques, par l’éducation et la pédagogie. Pour l’édition 2011, pas moins de 4 000 personnes se sont rassemblées à Info-Tech, un quartier dédié aux nouvelles technologies, afin d’y parler de Facebook et de Twitter. Un tour de force dans un pays où le débit du réseau wifi affiche des performances à peine meilleures que celles d’un modem 56K souffreteux. Et surtout, un formidable pied de nez aux autorités.


Photos via Flickr en Creative Commons : TTCPress ; Guseds ; M3li55@

Retrouvez notre dossier dictature Birmane sur Owni.fr et en anglais sur Owni.eu
Image de Une réalisée par Marion Boucharlat pour Owni /-)

L’opposition birmane dans le monde et l’application interactive

Webdoc Happy World, Birmanie la dictature de l’absurde


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